LE BEC MAGAZINE

Gilles Delalandre

15.03.2021

Rubrique : « Il reste du chemin à parcourir, mais on a déjà bien progressé ! »

Cette rubrique a pour objectif de montrer que, même si le travail de déconstruction du patriarcat et de création d’une société plus juste nous demandera encore de nombreuses années d’effort, nous avons déjà fait de grandes avancées depuis vingt ans, cinquante ans ou plus. Sa tonalité sera très optimiste.

C’est plutôt dans ma nature de voir le verre à moitié plein. Et je trouve cela plus constructif. À propos du patriarcat, vous pouvez penser que c’est plus facile pour un homme de penser cela. Vous avez certainement raison. Mais je suis un homme.

Si je participe au Bec, c’est parce que je veux être acteur d’une société plus égalitaire entre les hommes et les femmes. Je veux continuer à remplir le verre de transformations positives, pour que les femmes vivent dans une société plus juste et sans violence subie. Si les femmes apportent davantage à notre monde leur participation et leurs qualités, ces progrès de notre société, qui viendront bousculer un ordre établi, seront profitables à tous, aux femmes évidemment mais aussi aux hommes.

Si je participe au Bec, c’est aussi parce que c’est un moyen de développer mon sens critique à l’égard du patriarcat et de poser certaines questions. Par exemple, à propos du genre. J’ai compris depuis quelques années que l’éducation genrée des enfants en fonction de leur sexe biologique – ou de celui qui leur est attribué à la naissance – les enferme dans des rôles et des normes qui sont mentalement et socialement contraignants. Cette assignation à appartenir à un genre attribué n’a pas lieu seulement pendant l’enfance mais tout au long de la vie par des injonctions permanentes provenant de l’entourage social. Il faut entrer dans une case et y rester*.

Je me pose la question suivante : on me parle des qualités intrinsèquement féminines : sensibilité, écoute, empathie, dévouement… Certes, les hommes peuvent partager ces qualités, mais, en général, elles seraient propres aux femmes ! Je ne comprends pas ce que cela signifie. Si ces qualités peuvent être partagées par des hommes, elles ne sont donc pas uniquement « féminines » ? Ou bien, ces hommes-là seraient-ils féminins ? Si elles sont proprement « féminines », sont-elles attachées au genre féminin ? Ont-elles été transmises ou inculquées aux filles et aux femmes par l’éducation au genre ? Ou bien sont-elles liées au sexe biologique et à la maternité ? Aujourd’hui, à mon avis, il n’y a pas de réponse scientifique à ces questions.

Et donc, si on abolissait le genre, que resterait-il d’essentiellement – au sens essentialiste – féminin ou masculin ? Deviendrions-nous « unisexes » ou bien resterait-il des particularités liées au sexe biologique ?

Et abolir le genre, serait-ce un progrès ? N’est-ce pas plutôt la hiérarchisation homme/femme, genre masculin/genre féminin qu’il faut détruire tout en préservant des différences ?

Il y a évidemment de nombreuses autres questions. Par exemple, l’érotisme est-il attaché au genre, c’est-à-dire à l’apparence affirmée des caractéristiques féminines ou masculines ?

Je suis favorable à l’abolition du patriarcat, et je cherche à comprendre et à imaginer par quelle société le remplacer.

Dans cette rubrique, « Il reste du chemin à parcourir, mais on a déjà bien progressé », je propose de faire un petit tour de notre histoire et de voir comment les idées ont évolué au fil du temps.

 

À ce propos, je vous invite à découvrir l’essai de Judith Butler, Trouble dans le genre, paru aux États-Unis en 1990 mais qui n’a été traduit en français qu’en 2005 et aux éditions La Découverte.

 

 

 

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